Drogues : «ma vision est pragmatique»

Jeudi, 23 février, 2017

Journée d'étude Drugs in Brussesl 2017La Ministre de la Santé Cécile Jodogne prend position sur la question des drogues, voici son message à la suite de la journée d'étude du 22 février:

Je me suis exprimée ce 22 février lors de la journée d’étude «Drugs in Brussels 2017» devant les acteurs bruxellois du secteur de la santé, et les échanges que j’ai pu avoir avec les professionnels renforcent mes convictions en la matière.

De nombreuses données scientifiques le montrent clairement, les personnes confrontées à l’usage de substances psychotropes, accompagné ou non d’une dépendance, courent des risques importants pour leur propre santé : overdoses, infections au VIH et aux hépatites, ainsi que d’autres risques qui varient selon les produits et les modes de consommation. Certaines affections, comme l’hépatite C, représentent de véritables épidémies qui ont un coût humain et financier considérable.

L’approche purement sécuritaire du phénomène est extrêmement coûteuse et a montré ses limites. Il est grand temps de mettre au premier plan la priorité de santé publique dès lors qu’il s’agit de consommation de drogues, en privilégiant une vision pragmatique et progressiste qui met la santé de la personne et de la collectivité au centre des préoccupations.

Les personnes qui, à un moment donné de leur vie ou de manière plus récurrente, recherchent l’allègement d’une anxiété ou d’une pression sociale trop fortes et celles qui, devant faire face à la souffrance psychique, n’ont pas pu trouver un chemin thérapeutique adapté, peuvent être amenées à avoir recours à la consommation de drogues – consommation à grande dose d’alcool incluse.

Tel est mon point de départ pour apporter une réponse politique à cette problématique. Dès lors les premières réponses à mettre en place doivent consister à réduire les risques pour les personnes concernées comme pour la collectivité. Comment ?

Voici deux solutions exemples de solution concrètes, elles concernent spécifiquement l’usage d’héroïne par voie intraveineuse. La première est déjà mise en oeuvre et j’ai voulu encore la renforcer, et la deuxième, je veux la développer à Bruxelles.

J’avais annoncé le renforcement du dispositif d’échange du matériel d’injection, matériel mis à la disposition des usagers au sein des comptoirs d’échanges de seringues, afin de garantir de bonnes conditions sanitaires. Cette mesure a bien été concrétisée en 2016 et poursuivie en 2017 par l’octroi d’environ 35.000 euros supplémentaires (asbl Modus Vivendi).

Dans cette même optique, je souhaite aussi qu’on avance sur le dossier des salles de consommation à moindres risques (SCMR). Les personnes peuvent venir y consommer dans de bonnes conditions sanitaires et d'hygiène, encadrées par un personnel formé. La drogue elle-même n'y est évidemment pas fournie. Pareille structure a sa place à Bruxelles, moyennant un travail en amont, avec les professionnels du terrain, les autorités locales et les habitants concernés.

Je déplore que Madame De Block ne considère pas ce dossier de la consommation de drogues comme prioritaire. On sait que les besoins à Bruxelles en la matière sont criants. Une étude est à présent menée sur ce sujet avec le soutien de Belspo (le Service public de programmation de la Politique scientifique fédérale). Espérons qu’elle pourra guider de manière pragmatique les décisions politiques dans ce domaine, et qu’elle contribuera à repositionner le débat sur la base d’arguments scientifiques et concrets et non plus sur des a priori idéologiques.

Enfin, j’en appelle au dynamisme des acteurs de la société civile dans ce domaine, professionnels et bénévoles, pour continuer à sensibiliser et à faire évoluer les mentalités pour que se mettent en place de vraies réponses pour les personnes concernées, leur entourage, au bénéfice de la santé de tous.

Cécile Jodogne