Commerce et droits humains : au-delà du Myanmar…

22/10/2017

Depuis plusieurs mois, la situation de la minorité des Rohingyas au Myanmar (Asie du Sud Est) s’est fortement dégradée pour déboucher sur une catastrophe humanitaire.

Si Bruxelles Invest & Export (BI&E) [1] avait initialement prévu de participer à une mission économique avec l’AWEX au Myanmar, il a été décidé, fin de l’été, d’annuler cette participation. Cette décision n’a pas été prise à la légère. La mission au Myanmar était inscrite au plan d’action 2017 de BI&E en raison des opportunités économiques qu’offre ce pays, dont la lente transformation démocratique et l'ouverture au commerce international avait été constatées.

Dès lors, qu’est-ce qui a motivé notre décision ? Cette question s’inscrit plus largement dans le cadre de l’interaction complexe et récurrente entre les enjeux économiques du commerce extérieur et les enjeux de respect des droits humains.

Considérant la situation dans un pays d’exportation, quelles observations peuvent nous inciter à donner une prédominance aux facteurs déterminants pour l’évolution des droits humains, et à différer nos intérêts commerciaux immédiats ?

Car « immédiat » est bien le mot : la décision d’annuler notre participation à la mission au Myanmar s’inscrit en marge de l’instant présent, considérant la situation des droits humains.

En ce moment donc, deux constats s’imposent.

Premièrement, le non-respect du droit des minorités musulmanes Rohingyas s’est transformé en un long processus de déshumanisation pour ces personnes et aboutit à une politique dévastatrice dénoncée par l’ONU qui évoque la « très probable commission des crimes contre l’humanité ».

En second lieu, force est de constater que l’espoir d’avancement de la transformation démocratique suscitée par la venue au pouvoir de Madame Suu Kyi est aujourd’hui enrayé par la résurgence des clivages ethniques et religieux et malheureusement par son peu de considération à l’égard du droit des minorités.

Dans ce contexte, poser un acte concret tel que participer à une mission économique pour développer notre commerce extérieur avec le Myanmar est délicat.

Les balises que nous pouvons mettre pour pareilles décisions font appel à une analyse des effets de leviers potentiels, aussi ténus soient-ils, que peuvent avoir nos actions en commerce extérieur sur le respect des droits fondamentaux et de la dignité humaine, en termes de pressions conjuguées au niveau bruxellois, belge, européen et international.

A la question de notre participation à la mission au Myanmar, nous avons répondu clairement « non ». Les incidences positives probables seraient bien maigres face au risque de contribuer, si peu que ce soit, à une quelconque acceptation de la catastrophe humanitaire en cours.

La situation au Myanmar m'incite à vous faire part d'une réflexion qui va au-delà des questions qui se sont posées pour ce pays.

Aujourd’hui, amélioration des conditions de vie, respect des droits humains (y compris économiques et sociaux) et prospérité sont considérés comme indissociables. Dans l’économie globalisée, beaucoup observent que le respect du droit de vivre en sécurité et de l’intégrité de l’individu par le pouvoir en place sont des conditions cruciales pour un développement économique durable.

Je m’engage autant que possible sur cette voie, convaincue des vertus des échanges commerciaux responsables. C’est d’ailleurs dans cette optique que je reviendrai prochainement sur d’autres enjeux importants, comme mon soutien à l’entreprenariat bruxellois responsable dans nos pays d’exportation.

Comme toujours n’hésitez pas à me faire part de vos réactions ou questions via le formulaire contact de mon site ou les réseaux sociaux. Je me ferai un plaisir d’échanger avec vous.

Cécile Jodogne


[1] Le service du Commerce extérieur et des Investissements étrangers de la Région bruxelloise