5000 prostitué(e)s à Bruxelles, des ASBL luttent pour leurs droits

Lundi, 18 décembre, 2017

prostitution prévention droits personnes prostituéesSelon l'Observatoire bruxellois pour la prévention et la sécurité, 5000 personnes se prostituent à Bruxelles. Des chiffres interpellants sachant que les travailleurs du sexe s'exposent à des risques sanitaires élevés. Le point sur la situation et un rappel des actions d'aide mises en place.

L'égalité entre les hommes et les femmes constitue un droit fondamental et une des valeurs communes des pays membres de l'Union européenne. Au coeur de la compétence Santé de Cécile Jodogne au Gouvernement francophone bruxellois : une approche intégrée de l'égalité, transversale, systématique et préventive. L'un des objectifs du "Plan stratégique de promotion de la santé 2018-2022" est justement le suivi et la prise en charge des publics fragilisés, dont font partie les personnes prostituées à Bruxelles.

Quelque 1000 personnes seraient en vitrines, dans les carrées ou dans la rue alors que 4000 personnes exerceraient soit chez elles, soit dans des salons de massage. "Ce public est exposé à des risques sanitaires élevés, à la fois en raison des spécificités de son activité professionnelle, de conditions de vie dégradées, et d'une vulnérabilité individuelle et sociale. C'est pourquoi il s'agit d'un des publics spécifiques visés par des programmes de promotion de la santé et de prévention, axés notamment sur la sensibilisation, l'information, le travail de proximité et la formation des professionnels qui entrent en contact avec eux", explique Cécile Jodogne.

Les femmes exerçant la prostitution sont exposées à toutes sortes de risques : déséquilibres alimentaires, insomnies, dépendances et assuétudes, vulnérabilité psychique, multiples infections sexuellement transmissibles, problèmes gynécologiques, aggravation de troubles ou de maladies à composante psychosomatique, problèmes rhumatismaux, etc. La prostitution masculine représente quant à elle un tiers de la prostitution et est un phénomène à part. Les prostitués masculins, souvent homosexuels, sont mal connus. Il s'agit d'une prostitution de rue très discrète qui s'effectue surtout dans les parcs, ou alors dans des bars dédiés au milieu festif gay. Elle dérange très peu dans le sens qu'elle suscite moins d'attention et de réaction, moins d'intérêt, ce qui n'est pas normal.

Espace P..., Entre 2 et Alias - trois ASBL bruxelloises - mettent en place différentes actions pour permettre à ces personnes de prendre soin de leur santé physique et mentale.

L'accompagnement des personnes prostituées s'effectue sur base de deux priorités. D'abord d'un point de vue médical, l'accent est mis sur l'accompagnement psycho-médico-social en assurant une présence médicale régulière auprès des prostitué(e)s à Bruxelles, tout en poursuivant la vaccination contre l'hépatite B dans ce groupe à haut risque, la recherche épidémiologique, et en collaborant avec les hôpitaux, les centres de planning familial, les maisons médicales, Médecins du Monde, etc. Ensuite, en parallèle aux soins médicaux, un autre aspect fondamental est l'image et l'estime de soi.

Promouvoir la reconnaissance des personnes prostituées ou ex-prostituées en tant que citoyennes et citoyens à part entière et défendre leurs droits fait partie intégrante du travail transversal d'Espace P..., d'Entre 2 et d'Alias. Renforcer les connaissances et les ressources des personnes prostituées, les rendre actrices de leur santé et améliorer leur qualité de vie, c'est ce qui va permettre de déstigmatiser l'image des personnes prostituées et de la prostitution.

Pour y parvenir, les membres de ces ASBL élaborent différentes actions de terrain, au plus près de la réalité des personnes concernées. Cela passe notamment par un travail de rue consistant en la rencontre et l'écoute des personnes prostituées, en informant et en conseillant, mais aussi en distribuant des préservatifs, des brochures informatives sur le sida et autres IST et des éponges spermicides.

D'un point de vue médical, des suivis individuels dans un espace de confiance sont organisés afin de répondre aux demandes spécifiques telles que des contrôles gynécologiques, des prises de sang ou le traitement par une infirmière de pathologies bénignes. L'aspect social est également sérieusement envisagé puisqu'il prend en compte le renforcement des compétences sociales et relationnelles ainsi que l'autonomie en vue d'une réorientation vers des services plus spécialisés (CPAS, aide juridique, plannings, centres de désintoxication, etc.).

Enfin, ces ASBL investiguent régulièrement de nouveaux territoires de racolage pour informer des risques - notamment en matière de contamination aux IST/VIH et d'usage de produits psychotropes -, recueillir des données socio-épidémiologiques en observant le milieu, tout en effectuant un travail de concertation et en réseau.