L'art comme un acte de survie

Vendredi, 25 novembre, 2016

Cécile Jodogne a organisé un colloque autour des thèmes : l'art au service de la santé et l'art-thérapie au service des populations réfugiéesProfessionnels de la santé mentale, artistes, responsables d’associations et intervenants en art-thérapie se sont réunis il y a quelques jours, à l’initiative de Cécile Jodogne, Ministre de la Santé du Gouvernement francophone bruxellois.

Plus de 50 spécialistes ont répondu à l’appel

Ils se rencontraient pour la première fois autour des thèmes de « l’art au service de la santé et de l’art-thérapie avec les personnes réfugiées". Avec 7 intervenants, le programme de cette après-midi fut particulièrement dense en proposant « des témoignages d’expériences, qui certes mettent toutes à l’œuvre l’art et la créativité, mais dont les manières de faire, les contextes de leurs interventions et les publics concernés varient amplement », souligne Cécile Jodogne.

Le recours à l’art comme acte de survie

Madame Helyett Wardavoir, Doctorante Sc Santé Publique - HELB-IP et coordinatrice de la spécialisation en art-thérapie, a posé les jalons d’une approche théorique définissant un cadre, des concepts et une méthode d’analyse et d’évaluation des projets. « Parfois le recours à l’art peut être un acte de survie, un cri du cœur et du corps qui nous rappelle notre propre humanité » indique-t-elle notamment pour définir un rapport art-santé-bien-être.

Quant à cerner précisément ce que sont les pratiques en art-thérapie, nous avons retenu parmi les intéressantes approches proposées, ceci : « L’art-thérapie est indiqué pour toutes les personnes qui rencontrent des difficultés pour interagir avec leur environnement social, qui présentent un déni du corps et de ses besoins ou des déficiences physiques et psychiques, états dépressifs, anxieux ou encore dépendances ». Les bénéfices pour le « patient » sont multiples, voici comment les énuméra Madame  Wardavoir : « découverte d’un nouveau langage, nouvel engagement dans la vie, émotions positives, meilleure relation avec son corps, ... en bref : redevenir plus humain. »

« Un joyeux grain de sable »

Les clowns de Lapsus Lazuli nous font part d’une observation du Professeur Georges Casimir, Chef de Service, Directeur Général Medical, Hôpital Universitaire des Enfants :  « Les clowns amènent un joyeux grain de sable dans la routine des soins à l'enfant ».

Docteur Zinzin et Carabistouille – noms d’artistes de Patrick Beckers et Renelde Liegeois, expliquent qu’à chaque fois, le trac est là, « on démarre chaque fois avec une page blanche » confient-ils. « Notre objectif est de créer des liens avec délicatesse et respect, et dans cette démarche, on essaye d’inclure tout le monde. On vient faire une petite fête à la vie ».

Un lieu « Ouvert sur la rue et sur la cité »

« L’Heure Atelier » témoigna de l’expérience d’un atelier artistique accessible pour les personnes en souffrance psychique et « ouvert sur la rue et sur la cité ». Ce lieu est aussi un lieu d’ancrage, comme l’a exprimé si bien un participant aux ateliers : « ça fait maison ». Des artistes participent aux ateliers avec leur savoir spécifique et dans la relation entre l’artiste et les personnes « Il y a aussi un jeu où l’humain se risque » nous dit Françoise Calonne, coordinatrice.

Les artistes de l’Heure Atelier travaillent aussi sur des projets à long terme, sur une année, qui débutent avec l’apport de spécialistes de la thématique choisie et aboutissent à une exposition.

On veut « garder vivant ce qu’ils ont en eux de créatif»

C’est ce que nous a confié Sophie Querton, co-fondatrice de « Refugees got Talent ». 20 artistes de tous les pays d’origine, les plus concernés dans la récente migration des réfugiés ont été réunis. Ces personnes sont toutes en état de choc post-traumatique. Ils ont fui la guerre mais sont ici avec un besoin de s’exprimer. Des art-thérapeutes interviennent régulièrement, tous les mois et demi environ.

Aujourd’hui, on constate une amélioration, des liens se recréent lentement mais durablement.

Redonner la parole « à ceux qu’on a voulu faire taire »

Quant à Alan Vanoeteren, coordinateur du Service de Santé Mentale Ulysse spécialisé dans l’accompagnement des personnes exilées, il rappelle « qu’avant tout il ne faut pas oublier que nous nous adressons à des personnes que pour un certain nombre, on a voulu faire taire ». En plus du travail d’accompagnement, ils ont réalisé un travail communautaire autour d’un journal et d’une émission radiophonique.

Une approche internationale

Laurence Vandenborre, art-thérapeute fondatrice de l’association « The Red Pencil » : « on constate chez les personnes migrantes la conjonction d’un certain nombre de facteurs de traumas : situation difficile dans le pays de départ, traumatisme du parcours, deuil des personnes abandonnées ou perdues, difficultés à trouver sa place dans le pays d’accueil, déstabilisation de la personne. »

L’association existe depuis 5 ans. Le cœur de l’action de Red Pencil est l’intervention dans les situations les plus délicates. Ils s’inscrivent dans les missions humanitaires internationales. The Red Pencil souhaite centrer son intervention en Belgique sur la problématique des migrants. Pour ce faire The Red Pencil va proposer des partenariats en Belgique, associations ou SSM.

Des pratiques professionnelles à prartager

La Ministre a invité les participants à continuer ces échanges afin prolonger la réflexion et de favoriser les synergies entre intervenants dans l’intérêt des bénéficiaires de l’art-thérapie et de toutes les pratiques professionnelles dans ce domaine, mettant l’art au service de la santé.