Rampes d’accès à l’international pour les startups bruxelloises

Entretien avec Cécile Jodogne

Startups et commerce extérieurQuelle est votre approche pour l’accompagnement des startups à l’international ?

Cécile Jodogne – Pour répondre aux besoins spécifiques des startups (1) candidates à l’exportation et favoriser leur attractivité pour les investisseurs, je compte adapter ou renforcer les moyens existants, par exemple via des appuis budgétaires ciblés. Et ici comme dans d’autres domaines, ce sont les réalités qui doivent orienter les choix politiques.

Quelles sont ces réalités ? Pouvez-vous poser quelques balises ?

C. J. – Notre Région est un terreau fertile pour les startups. En Belgique, une sur trois se développe d’abord en Région bruxelloise où le secteur numérique produit 7,6% du PIB. Pour ce qui est du nombre d’initiatives entrepreneuriales de type startup, Bruxelles est en 9ème position pour l’Europe.

Cependant, seules 30% de celles qui ont dépassé la phase start-up (après 5 ans en moyenne) atteignent le stade de développement scale-up (2). Il est intéressant de souligner qu’une fois ce stade atteint, les entreprises technologiques belges décrochent de nombreux accords d’investissements. Selon le European Scale-up Report, elles sont en 6ème position pour le marché européen. Considérant le nombre de scale-ups, Bruxelles est d’ailleurs en 7ème position, mieux que pour les startups.

Stratups, commerce extérieur en Région BruxelloiseA quel moment de la vie d’une startup et dans quels secteurs faut-il agir pour favoriser leur développement à l’international ?

C. J. – Pour les entreprises technologiques, comme pour les secteurs traditionnels, le développement des activités à l’exportation, tout comme la capacité de lever des fonds auprès d’investisseurs étrangers facilitent l’accès à une croissance durable.

Pour ouvrir ces portes, elles doivent accéder à un stade de développement suffisant, et les constats que je viens d’évoquer montrent que c’est là que le bât blesse. C’est donc à ce moment de transition dans la vie de ces entreprises qu’il faut leur apporter un soutien.

Je pense aussi que l’action publique dans ce domaine doit viser en priorité des secteurs porteurs tels que les FinTech, HealthTech, les médias numériques, la mobilité, ou encore le design. Nous sommes aussi attentifs aux technologies particulièrement prometteuses et déclinables comme le traitement et l’analyse du Big Data, les objets connectés et la réalité virtuelle, dont les applications sont à haut potentiel pour l’exportation.

Quels sont les moyens dont dispose la Région bruxelloise à l'international ?

C. J. – Le premier outil au service des entreprises, c'est le réseau de 90 attachés économiques et commerciaux répartis à travers le monde dont deux se sont spécialisés dans le domaine technologique. En effet, depuis 2011, Brussels Invest & Export (BI&E) dispose d’un hub digital à San Francisco, au cœur de la Silicon Valley, et depuis 2012 à Chennai, au cœur du marché indien où les entreprises technologiques occupent une place importante.

Ces deux postes sont de plus en plus sollicités par les entreprises technologiques bruxelloises. En 2016, 15 pépites innovantes de l’économie bruxelloise ont bénéficié de leurs services. Cette même année, 30 entreprises ont été accompagnées pour une prospection dans la Silicon Valley. Nous avons également positionné 7 entreprises bruxelloises dans 3 villes du Sud de l’Inde lors d’une mission «smart cities».

Les startups qui veulent se faire connaître en dehors de nos frontières peuvent également faire appel aux incitants financiers de BI&E. Dans certains cas, par exemple pour ouvrir un stand lors d’une foire internationale, des startups ont droit à un taux d’intervention plus élevé dans les frais liés à leur stand; un principe que je voudrais appliquer à toutes les aides financières en matière de commerce extérieur.

Startups et exportationsPour cette année, quelques exemples d’actions à l’agenda ?

C. J. – En 2017, 11 actions sont programmées, y compris de nouvelles initiatives, en direction des startups du secteur technologique :

  • 1 mission économique "Connecting Brussels with the Silicon Valley" à San Francisco;
  • 2 participations annuelles aux salons Cebit (Hanovre) et Mobile World Congress (Barcelone);
  • 4 nouvelles participations, aux salons “Laval Virtual” (Laval), “Smart City Expo” (Barcelone), “Techcrunch Disrupt” (San Francisco) et “Sluch” (Helsinki);
  • 2 missions IT pour des «export starters» à Londres et à Paris;
  • 1 invitation d’acheteurs d'Israël et des Territoires Palestiniens;
  • 1 journée de contacts à Berlin.

BI&E prévoit également la 4ème édition de sa formation BEST qui s’adresse aux néo-exportateurs, majoritairement actifs dans le secteur. Cette formation consiste en 5 cours du soir et un coaching individuel permettant aux startups souhaitant étendre leur business à l’étranger, de développer une stratégie et un plan d’export. 

En conclusion ?

C. J. – Ici comme ailleurs, je veux favoriser les synergies pour optimiser les moyens mis en œuvre, en privilégiant l’impact réel des actions, pour une efficacité maximale des budgets alloués.

Je n’ai donc pas voulu créer une énième instance dédiée aux startups innovantes et ce faisant disperser les moyens dont nous disposons pour stimuler l’exportation, mais plutôt optimiser ce qui existait déjà et inscrire mes actions pour l’internationalisation des startups dans les initiatives que nous portons avec mes collègues du gouvernement bruxellois, ou que nous soutenons.

Ce fut le cas par exemple à l’occasion de la “Brussels Digital Week”, soutenue par le gouvernement bruxellois, lors de laquelle j’ai convié des acheteurs et investisseurs étrangers à une séance de pitching (3) ouverte à plusieurs startups technologiques bruxelloises.

---

(1) Une startup est un entreprise débutante et innovante, pilotée par ses actionnaires-dirigeants. Elle évolue souvent dans un environnement technologique mouvant. Ses flux de trésorerie disponibles sont négatifs et elle se finance par capitaux propres.

(2) "Une scale-up est une entreprise qui répond à au moins un de ces critères: 10 employés au minimum, le statut juridique de SA, au moins une filiale à l'étranger ou au moins 10 ans d'activité. » Omar Mohout, Professeur à l’Antwerp Management School.

(3) le pitch est une présentation rapide, limpide et enthousiasmante d’un projet entrepreneurial s’adressant en priorité aux investisseurs/partenaires potentiels.